15 juillet 2023
Aujourd'hui on remplace la moquette par du parquet, le poêle à mazout par un poêle à bois, on construit des maisons en bois et même des lunettes et des montres en bois. Alors, à l'heure où notre automobile est montrée du doigt comme source de tous les maux de la planète, cédez à l'écologie de surface : il vous faut un modèle woody.
Jusqu'à la fin des années 20, le bois domine largement dans la construction automobile, mais il se cache.
La structure d'une majorité d'automobiles est réalisée en bois. On fixe dessus des panneaux de tôle, ou parfois de toile enduite suivant le procédé Weymann. Cela rend difficile la réalisation de formes arrondies : c'est l'époque des "caisses carrées".
Ce procédé sera encore employé bien après la guerre pour réaliser à l'unité les belles carrosseries des modèles de grand luxe.
Structure bois Peugeot 181 B de 1925
(doc. Yalta Production)
Pour obtenir les premiers véhicules professionnels, sur des châssis de berlines à la transmission et aux suspensions arrière plus ou moins adaptées on greffe des plateaux à vocation utilitaire. Le bois se prête particulièrement bien aux fabrications spécifiques en petites séries. Réalisées en usine ou chez d'habiles artisans menuisiers, les boulangères et normandes arrivent sur nos routes.
Consultez la fiche complète de la Citroën 10 HP B2 boulangère de 1921
Consultez la fiche complète de la Ford T camionnette
Le milieu des années 20 voit apparaître les premières carrosseries "tout acier".
Budd en Amérique, Ambi Budd en Allemagne, Pressed Steel en Angleterre, tous appliquent les mêmes procédés et réalisent les premières portions de carrosserie en un seul bloc.
En France, seuls les gros industriels comme Citroën ou Peugeot peuvent s'offrir les licences et les énormes presses capables de former la tôle. Les éléments sont ensuite soudés entre eux et le squelette en bois disparaît.
En France, la Citroën B14 est la première a bénéficier de ce système qui permet d'obtenir des gains de poids et de solidité.
Consultez la fiche complète de la Citroën B14 G conduite intérieure
Innovation ultime, la carrosserie en acier monocoque supprime le châssis. En 1934, la Traction est plus légère, plus basse et bien plus sûre que ses concurrentes. Le tournant de la monocoque qui demande d'énormes investissements industriels sonne la fin programmée des carrosseries composites (bois + tôle), mais aussi la fin des constructeurs de taille intermédiaire.
Consultez la fiche complète de la Citroën 7A "traction avant" en 1934
Les réalisations en bois, plus originales et souvent moins coûteuses que les carrosseries tout acier, sont encore en usage, notamment pour les beaux breaks, appelés station wagon aux USA.
Consultez la fiche complète de la Ford V8 modèle 68 Station Wagon
Jusqu'en 1939, les carrosseries des breaks woody Ford étaient assemblées par Murray Corporation of America, à partir de bois provenant des forêts du nord du Michigan, propriété d'Henry Ford. Murray est alors un des plus gros carrossiers indépendants.
Concevoir et fabriquer des panneaux de carrosserie en acier coûte très cher, surtout pour des breaks à la diffusion forcément restreinte. Alors les constructeurs, comme Oldsmobile, proposent ces très beaux modèles à panneaux de bois.
Consultez la fiche complète de la Oldsmobile Series 60 Station Wagon Woody
En France aussi, les breaks s'habillent de bois, comme la 202 dès 1938.
Consultez la fiche complète de la Peugeot 202 canadienne
...ou chez Simca
Consultez la fiche complète de la Simca 8 Fourgonette
ou en Angleterre. Dieu sauve George VI et sa Lea Francis kitchissime !
Consultez la fiche complète de la Lea Francis 14 HP Shooting Break Woody
Les premiers véhicules de loisirs apparaissent. Jeep lance en premier ce break très cool pour les week-end en forêt.
Le bois n'est qu'un décors peint sur la tôle.
Consultez la fiche complète de la Jeep Willys Station Wagon 1946
La mode des véhicules de loisirs ne fait que s'amplifier. Héritiers de la fameuse Jeep Willys, les 4x4 conjuguent accès aux grands espaces et confort de berline. De quoi se reconnecter à une nature un peu idéalisée.
Consultez la fiche complète de la Jeep Wagoneer 1963
Les flancs sont décorés de bandes adhésives 3M Di-Noc, imitant le bois.
Les beaux breaks en bois inspirent à Henry Ford l'idée de ce cabriolet branché. Hêtre ou frêne et acajou verni, le résultat est assez agréable. La mode du style woody est lancée.
Consultez la fiche complète de la Ford 1946 Super Deluxe Sportsman Convertible Woody
Chrysler se lance à la poursuite de Ford sur ce créneau de niche valorisant.
Consultez la fiche complète de la Chrysler Town and Country de 1946
...puis bientôt General Motors et ses belles Buick.
Consultez la fiche complète de la Buick 1953 Roadmaster Estate Wagon
La carrosserie Estate Wagon Woody n'est proposée que sur la Super ou la Roadmaster. Toute la partie supérieure de la voiture à l'exception du pavillon, est en bois vernis (ce n'est pas un décors en vinyle).
Dans l'empire britannique, la Morris Minor est un vrai succès.
Sur la Morris Traveller, la version break, les éléments de boiserie ne sont pas purement décoratifs, contrairement à d'autres woody du marché.
La moitié de la carrosserie avant est en acier, identique à la berline. La partie arrière, détachable, est constituée d'une armature extérieure en frêne verni sur laquelle sont fixés des panneaux en aluminium peints comme le reste de la voiture. La simplicité n'est pas un concept anglais.
Consultez la fiche complète de la Morris Minor 1000 Traveller
En 1960, la Mini surprend par son vaste espace intérieur malgré sa taille minuscule. Quant au break Countryman, il a pour particularité d'être entouré de pièces de vrais bois totalement inutiles : c'est juste de la déco !
Consultez la fiche complète de la Austin Mini Countryman
Le break (Station Wagon) de la Chevrolet Caprice possède un hayon très particulier qui se replie sous la carrosserie, laissant ainsi un libre accès au chargement. Sur les flancs, un décors de faux bois en vrai plastique.
Consultez la fiche complète de la Chevrolet Caprice Classic Estate 74
La luxueuse Buick Estate Wagon de 1977 possède un beau revêtement vinyle 3M particulièrement "cool". L'intérieur est loin de celui d'un utilitaire, avec ses sièges luxueux, son tableau de bord en faux bois et sa climatisation déjà à commande sensitive.
Consultez la fiche complète de la Buick Estate Wagon 1979
En structure ou en déco, en bois véritable ou en vinyle, le bois c'est fini dans l'automobile.. ou pas.
Le 4 juin 2023, l'étude Rouillac a adjugé la 2 CV en bois de Michel Robillard pour la somme un peu dingo de 170 000 euros. Elle est entièrement réalisée en bois fruitier : noyer pour les ailes avant et arrière, poirier et pommier pour la carrosserie, merisier pour le remplissage des portes et le coffre arrière, loupe d'orme pour le tableau de bord. Capote noire en alpaga. Sellerie en tissus gris.
Elle est construite sur le châssis d'une Citroën Dyane de 1969, avec un moteur essence de 602 cm3.
Pour ce prix elle roule, mais elle ne recrache pas de la chlorophylle, mais bien du CO2 (beurk !).
2 CV 1955 en bois de Michel Robillard
(doc. Rouillac)
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